Recommandations pour les experts en communication surchargés

Si l’on considère la crise actuelle d’un point de vue sociologique, on peut qualifier la pandémie de Coronavirus comme un « wicked problem ». Traduit littéralement, il s’agit d’un problème délicat, épineux et commun. Il s’agit d’un problème très complexe, singulier, dont on ne connaît ni l’ampleur ni la solution exacte. La complexité sociale associée à un tel problème est typique du fait que chaque personne impliquée peut avoir un regard différent sur la question, avec plus ou moins de valeur ajoutée. En tant qu’expert en communication, comment faites-vous face à cette situation ?

Nous avons posé quatre questions à un groupe d’experts de différents secteurs. Leurs réponses ont été regroupées en recommandations. Nous espérons qu’elles vous aideront à mieux gérer le flux d’informations ainsi que la communication interne et externe de votre organisation, et à obtenir une plus grande adhésion de votre équipe de gestion de crise à votre stratégie de communication.

Quelles sont les informations auxquelles vous accordez la priorité ?

En tant que responsable de la communication, vous êtes confronté à divers partenaires et acteurs de la crise, chacun d’entre eux ayant une partie du puzzle de la communication entre leurs mains. Bien entendu, chacun trouve que son information est la plus importante et souhaite ainsi qu’elle soit communiquée en premier lieu au reste de l’organisation ou au monde extérieur.

Cela signifie qu’en tant que responsable de la communication, vous devez non seulement avoir une bonne vue d’ensemble de toutes les informations disponibles, mais vous devez également faire correspondre les informations fournies aux cadres de pensée de votre ou de vos groupes cibles. En d’autres termes : vous devez avoir une bonne vue d’ensemble des besoins d’information de votre ou de vos destinataires, et prioriser votre communication sur cette base.  Connaître les faits, indiquer les actions et reconnaître les nécessités (FAN). Ce sont les trois concepts clés.

A partir des réponses, nous distillons les prochaines étapes :

  • Commencez par saisir correctement la communication, les informations, les mesures et les lignes directrices au niveau national.
  • Faites une analyse de la perception interne et/ou externe : comment les personnes impliquées dans votre organisation ressentent-elles cette crise ? que se passe-t-il dans votre organisation ? Et qu’en est-il des parties prenantes extérieures ? Cartographiez l’impact, les besoins et les sentiments.
  • Structurez votre communication : utilisez la méthode « Faits, actions, nécessités » (FAN) dans votre communication avec votre personnel, mais aussi avec votre direction.
  • Utilisez « we know, we do, we care, we’ll be back » pour votre communication externe. (Faits ; actions ; résonnance/empathie ; suivis/besoins)
  • Traduisez les faits, les actions, les besoins dans votre communication au sein de votre propre organisation. De cette façon, vous clarifiez ce qui se passe et placez l’organisation de vos propres opérations dans un cadre plus large qui se réfère aux informations et aux directives du gouvernement. Il est ainsi plus facile de comprendre votre message.
  • Établissez des priorités :
  1. Des informations importantes pour tous, et qui doivent être appliquées immédiatement
  2. Informations importantes pour des groupes cibles précis et qui doivent être appliquées immédiatement
  3. Informations d’intérêt général, mais non urgentes
  4. Informations utiles pour un ou plusieurs groupes cibles spécifiques, mais non urgentes
  • Faites également place aux nouvelles positives ! Célébrez petites victoires ! Partager une initiative chaleureuse ou un fait divers plus léger et amusant contribue à maintenir le moral de toutes les personnes impliquées.

Points importants:

  • Concentrez-vous sur la communication interne ; c’est là où il se trouve le plus grand besoin! De plus, la communication interne est également souvent de la communication externe.
  • Rappelez-vous le principe de Pareto : 20 % de votre contribution fournit 80 % du résultat. Donc, réfléchissez bien sur quoi vous concentrez votre temps et votre énergie !
  • Déterminez d’abord ce que vous voulez réaliser avec votre communication. Présentez ensuite vos informations aussi clairement et bien organisée que possible ; à qui sont-elles destinées ? Que devez-vous en faire ? QU’est-ce que vous détectez et comment y faites-vous face (traitement de l’information) ? Gardez toujours une ouverture pour des commentaires ou des questions supplémentaires.
  • Et surtout : soyez cohérent dans votre message et diffusez-le à travers vos canaux habituels.

Comment gagner la confiance de votre équipe/cellule de gestion de crise ? (CMT)

Il est un peu simple de dire que vous auriez dû travailler sur votre crédibilité et votre confiance avant cette crise de Coronavirus. Heureusement, chaque crise donne également l’occasion aux équipes de communication de montrer leur expertise ou de la renforcer dans « le feu de l’action ». Il est essentiel de comprendre ce que fait une équipe de gestion de crise, quels sont ses défis et comment fonctionnent ses processus décisionnels (perception, appréciation, décision) afin de gagner une place en tant que partenaire (de communication) fiable de l’équipe. Voici, par conséquent, les conseils suivants :

  • Assurez-vous que votre propre équipe de communication de crise (CCT) soit structurée.
  • En tant que responsable de l’équipe de communication, adoptez une position claire au sein de la cellule de gestion de crise : celle d’une source fiable sur l’impact, les besoins et le sentiment à l’intérieur et à l’extérieur de votre organisation.
  • Au sein de l’équipe de gestion de crise, faites partie de la solution et non du problème. Par conséquent, vous devez écouter et poser des questions spécifiques en fonction de vos besoins/nécessités pour faire votre travail.
  • Votre rôle le plus important en tant que conseiller au sein de l’équipe de gestion de crise est de distinguer la perception de la réalité, de les interpréter et d’y répondre en termes de stratégie de communication à suivre.
  • Le passage de la réalité à la perception doit être central.
  • Une bonne culture décisionnelle et une structure de réunion claire (RPADAS)[3] doivent être au centre de l’équipe de gestion de crise. Aidez à le mettre en place ou à le maintenir.

Points importants:

  • Veillez à ce que, en tant que responsable final de la communication, vous ayez une « vue aérienne ». Cela vous permet d’éviter de subir une surcharge d’informations.
  • Une « vue aérienne » aide à détecter et à alimenter la « recherche de sens » dans votre organisation.
  • Si vous n’êtes pas en mesure de le faire vous-même, par exemple parce que vous en faites trop, assurez-vous de pouvoir faire appel à un « contre-orateur ». C’est une personne en qui vous pouvez avoir totalement confiance, et qui peut prendre de la distance, mesurer la tension de l’organisation et avec qui vous pouvez vous débattre (voire vous disputer) sur votre stratégie et votre approche de communication.
  • Approfondissez la façon dont la cellule de gestion de crise traite la continuité des activités et les analyses de conséquences.

Qui/Qu’est ce qui peut vous aider à défendre votre stratégie ?

Il est essentiel de savoir sur qui et sur quoi vous pouvez compter. Vous ne pouvez pas résoudre une crise tout seul. Impliquer des parties prenantes suffisantes et multiples est une chose, les laisser travailler ensemble en est une autre. La coordination avec l’équipe de gestion de crise et la création d’alliances peuvent aider. Imaginer une stratégie, la construire et la mettre en pratique est un travail d’équipe. Par conséquent, vous avez besoin d’une équipe avec des membres qui ont le regard dans la même direction. Si vous n’avez pas d’équipe, rassemblez autour de vous des personnes sur lesquelles vous pouvez compter pour obtenir des conseils, une rétroaction ou un coup de main. Déterminez la direction à suivre sur la base de votre analyse de perception. Vous ne devez pas toujours inventer la roue vous-même, et vous pouvez facilement adopter les meilleures pratiques d’autres organisations. Veillez à ne pas tomber dans le piège de penser que les autres peuvent faire tellement mieux. Chaque organisation est différente, et mérite donc une approche différente en matière de communication !

  • La stratégie est basée, entre autres, sur les résultats de votre analyse de perception.
  • Expliquez clairement ce que vous voulez réaliser à court, moyen et long terme.
  • Attention : ce sont trois processus de réflexion différents, qui doivent s’imbriquer les uns dans les autres.
  • Formez des alliances : au sein de votre propre organisation, au sein de l’équipe de gestion de crise, mais aussi avec des collègues en dehors de votre organisation.
  • Rassemblez des personnes ayant des connaissances et de l’expérience, et laissez-les travailler ensemble.

Points importants:

  • Il y a une différence entre avoir raison et donner raison. Avec une bonne stratégie, basée sur une analyse de perception solide, il est plus facile de faire les choses correctement !
  • Discuter de votre plan à l’avance et « rebondir » sur un « adversaire » peut aider à le rendre plus fort, mais aussi à gagner en persuasion.

Pourquoi ce problème se fait-il sentir maintenant ?

C’est un ‘wicked problem’. Il n’y a pas de solution facile et cela effraie beaucoup de gens. Cela signifie également que les méthodes et processus familiers de gestion des crises et de communication ne fonctionnent plus. D’autre part, nous sommes maintenant également confrontés à une surcharge des canaux de communication, ce qui ne facilite pas la tâche des services de communications pour saisir toutes les informations, et encore moins pour les transmettre.

Réalisez que vous n’êtes pas le seul à être confronté à ce problème.  Alors : “Détendez-vous, rien n’est sous contrôle! »

Téléchargez la brochure d’information
avec des recommandations et des modèles utiles ici

Dr. Hugo Marynissen

Hugo Marynissen is senior partner at PM • Risk Crisis Change. Since 2008 he has provided regular coaching and consultancy services in the field of risk and crisis management. During the terror attacks in Brussels (March 22, 2016), PM advised Belgium’s Prime Minister and his team on the crisis communication strategy.

Kim De Raedt

Kim De Raedt is a crisis advisor and strategist with a background in both Media and Government, with a great focus on editorial work, advice on media mix/content planning and crisis trainings over the past years. Since 2017, Kim is an active member of TeamD5, the Federal Belgian Crisis Communications Response Team.

Initiative et à la demande de

Stijn Pieters (PM • Risk Crisis Change), Dany Daelemans (Communication AZ Sint Maarten) et Johan Meerbergen (Communication vzw Emmaüs). Avec le soutien d’Annebeth Boudry (Kortom) en Lieve Dhaene (Zorgnet-Icuro).

Avec la contribution des personnes suivantes. Un grand merci !

  • Anne Coetsier (HR, vzw Zorg-Saam)
  • Bert Brugghemans (Commandant, Brandweer Zone Antwerpen)
  • Catherine Zenner (Responsable de communication, AZ Maria Middelares Gent en AZ Sint-Vincentius Deinze)
  • Frank Maertens (Commandant, Zone d’urgence Fluvia)
  • Jasmien O (Chef de service de communication, Brandweer Zone Antwerpen et membre du TeamD5)
  • Karlien Wouters (Attaché de presse, UZ Gent)
  • Katrien Goossens (Experte communication)
  • Kevin Mollet (Responsable de communication, AZ Damiaan)
  • Peter van Thienen (Coordonnateur des projets et coordonnateur du plan d’urgence de l’hôpital, ZNA)
  • Roeland Kortleven (Chef de service de communication, Gemeente Mol)
  • Rudy Claeys (Chef de service Prévention & Environnement, AZ Sint-Elisabeth Zottegem)
  • Sofie Daniels (Chef de service de communication Stad Hasselt et membre du TeamD5)
  • Stijn Pieters (Managing Partner, PM • Risk Crisis Change et membre du TeamD5)
  • Tim Van Achte (District09 – Stad Gent et membre du TeamD5)
  • Vanessa Broux (Responsable de communication Stad Genk et membre du TeamD5)
  • Veronique Degryse (Responsable de communication, Stad Roeselare)
Domain: Recherches
Keyword:
Type: Article
Language: Français
Article précédent
RPADAS: un outil pratique à l’aide à la gestion de crise
Article suivant
Communication de crise, réputation et continuité des activités : l’exemple de Ferrero
Menu